LA mission…attaché territorial, un concours, des années de travail, mais en fait, il n’y a qu’un devoir à retenir… l’obéissance…devoir de soumission? A lui seul ce concept hors du temps mériterait une chronique. Mais pour l’heure, Athos nous livre « l’attaché-case », la box idéale pour accompagner son élu ou chef de service en déplacement. Un peu d’anglais, du gel antibactérien et surtout…du café…

Un café Michel ?

  –        Athos, vous avez votre gel pour les mains ?

Deuxième jour au Farghestan : je vois l’angoisse qui monte dans les yeux de Bob. Il s’est révélé hypocondriaque à la sortie de l’avion et ne me quitte plus d’une semelle depuis qu’il a découvert que je détenais une trousse de premier secours dans mon sac. Je soupçonne Dracula d’avoir amplifié le phénomène en lui rapportant deux ou trois légendes urbaines (ou plutôt farghestanaises) sur des bactéries sournoises et croqueuses d’hommes qui se seraient installées dans la région. Tandis que Jérémy a le champ libre pour se mettre en avant, Bob palpe son front et guette son reflet dans une vitre pour voir s’il ne développe pas une fièvre ou une jaunisse subite.

–        Je les ai entendus parler de fièvre puerpérale. Vous pensez que je risque de l’attraper si je vais visiter leur dispensaire ?

–        Non Michel, a priori aucun risque. Tenez, prenez un café avant que l’on y aille. Café et gel hydro-alcoolique.

Voilà à quoi se résume pour le moment le séjour de Bob au Farghestan. De mon côté, comme prévu, je suis voix off de la traduction, scribe, sherpa du thermos à café, distributeur de lingettes nettoyantes et autres antiseptiques, … Encore une vraie belle mission à rajouter à mon CV. Le challenge est quand même de supporter Dracula qui comprend l’esprit d’équipe comme « lui et lui-même », vision un peu réductrice qui complique la tâche au quotidien. Et inutile de compter sur Bob pour une quelconque riposte, trop occupé à écumer les forums de Doctissimo grâce au wifi de l’hôtel.

–        Athos, vous serez gentille de nous faire un compte-rendu des réunions d’aujourd’hui en rentrant de votre petite sortie avec Michel ? J’ai besoin de me relaxer à l’hôtel après ces débats.

Les « débats » du jour ne sont en fait qu’une série de réunions peuplées de bonnes intentions et de quasi déclarations d’amour mais en l’écoutant, j’ai presque la sensation que j’ai à faire à Talleyrand partant faire une pause en plein Congrès de Vienne tandis que je pars en goguette avec Bob. Mais hausser un sourcil sur la demande de Dracula est un risque que je ne prendrais pas. Adjoint sur un malentendu et pas pour des compétences surnaturelles, il rappelle à la moindre occasion le sacro-saint principe hiérarchique, l’obéissance et tous ses dérivés. Je refuse de rajouter mon nom à la liste des victimes de son égo frustré.

Troisième jour : Bob vérifie sous les néons du restaurant de l’hôtel, la propreté de sa tasse à café tandis que Dracula nous fait un cours à froid en plein petit déjeuner sur les nouveaux enjeux du Farghestan qu’il a débusqués depuis notre arrivée. C’est dans ce genre de moment, que l’on se rappelle avec nostalgie de ces matins à trainer en peignoir chez soi, à boire son café tranquille, et sans un discours de Dracula pendant que l’on beurre sa tartine.

–        Je vous sers un café Michel ? On a une grosse journée encore aujourd’hui !

Quatrième jour : Bob et moi on n’arrête plus, on est partout. Une réunion, une deuxième réunion, un power point, un débat, une visite, une contre visite, des repas, des buffets, un autre power point et bien sûr du café. Dracula de son côté s’est finalement décidé à nous suivre dans nos visites de dispensaires, écoles, cantines et autres infrastructures. Jamais sans une chemise blanche pour ces sorties,  il se rêve tel un BHL administratif, les yeux dans le vague certainement en quête d’inspiration pour son prochain monologue du petit-déjeuner.

Cinquième jour : « Athos, dépêchez-vous, on a la conférence et le cocktail de clôture ! Non mais, c’était utile de mettre tout ce temps ? »

Oui, c’était tout à fait nécessaire et même indispensable de m’enduire d’anticernes et de me prendre ma propre dose de caféine car, après seulement cinq petits jours, je n’ai quasiment plus de gel antibactérien, une cagette entière de documents à ramener au bureau, et la voix de Jeanne Moreau à force de traduire en continu. Ultimes épreuves du jour avant le retour : endurer le discours de clôture de Dracula qui s’est proposé pour le faire, persuadé de ses talents d’orateur (et m’a « proposé » de lui faire un power point en urgence), et surmonter le cocktail d’au revoir à base de spécialités locales.

–        Vous avez pris le power point pour Jérémy?

–        Oui.

–        Vous avez votre portable ?

–        Oui.

–        Vous pensez qu’ils cachètent bien les bouteilles d’eau minérale ?

Je n’en sais rien… Un café Michel ?